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Ambassadors

INTERVIEW : CHARLEY BOORMAN PARLE DE LONG WAY UP, DE SES ACCIDENTS ET DES HARLEY DAVIDSON ÉLECTRIQUES AVEC QUAD LOCK

La vie de Charley Boorman est tout simplement incroyable. Sa série télévisée Long Way l'a mené, en compagnie de son ami Ewan McGregor, grand passionné de moto comme lui, de Londres à New York, puis de l'Écosse au Cap et, plus récemment, d'Ushuaia à Los Angeles...

Mis à part l'itinéraire, la différence entre Long Way Up et Long Way Round ou Long Way Down est que Charley et Ewan ont cette fois-ci parcouru 21 000 kilomètres sur une Harley Davidson Livewires, premier véhicule électrique de la marque.

Ceux qui ont regardé la série ont probablement remarqué que Charley et Ewan utilisent tous deux un Support moto Quad Lock pour leur navigation. J'ai eu la chance de pouvoir échanger quelques mots avec Charley sur ce voyage et certaines de ses expériences les plus mémorables.

Charley a également parlé de ses débuts d'acteur, de certains de ses accidents les plus terribles (où il a vraiment mis Quad Lock à l'épreuve) ou encore de l'avenir de la moto... et même de ses projets de nouvelle grande aventure avec Ewan.

J'espère que vous aurez autant de plaisir à lire cette interview que moi à la réaliser : ce type est une vraie légende !

- Tim, Quad Lock

TRANSCRIPTION :
Quad Lock

J'adore la série, Charley. Je croyais que ce serait un peu déprimant de regarder un documentaire de voyage en plein confinement, mais j'ai finalement trouvé très réconfortant, dans ces circonstances, de pouvoir penser au vaste monde qui nous entoure. Racontez-nous en quoi consistait Long Way Up et comment tout cela a commencé.

Charley Boorman

Je ne sais pas si beaucoup de gens se souviennent de moi, mais il est probable que l'on me connaisse surtout pour Long Way Round et Long Way Down, que j'ai tournés avec Ewan McGregor au fil des ans. Je crois que la première série remonte à 2004. Le périple consistait à aller de Londres à New York en voyageant vers l'est. Nous sommes donc passés par le Kazakhstan, la Mongolie, la Sibérie... Après une autre aventure dans laquelle nous avons traversé toute l'Afrique, Long Way Up nous a emmenés du fin fond de l'Argentine à Los Angeles.

Avant tout ça, j'étais acteur. Mon père, cinéaste, a réalisé des films comme Délivrance, Excalibur, Hope and Glory (La Guerre à sept ans), La Forêt d'émeraude, entre autres nombreux films dans les années 60, 70, 80 et 90. À l'époque, c'était un très grand réalisateur. Nous étions quatre enfants à la maison et nous avons toujours été impliqués dans ses films. Il disait toujours : « Oh, pas la peine d'engager des enfants pour mes films. J'en ai quatre que nous pouvons utiliser gratuitement. »

On peut donc dire que nous avons participé à ses films parce qu'il était trop radin pour employer des enfants acteurs. C'est donc comme ça que la première fois que j'ai joué, c'était dans le film Délivrance. Je ne sais pas si vous l'avez vu. Attention, ce n'est pas moi qui faisais le joueur de banjo, juste pour que les gens le sachent. En fait, mon père m'avait montré un tricycle et m'avait dit : « Écoute, si tu t'assois sur ce canapé à côté de ce type, je te donne un tricycle. » Je sais que la proposition peut sembler assez louche, mais j'avais vraiment envie de ce tricycle.

Je me suis donc assis sur le canapé avec le type en question, qui intervient à la fin du film et n'était autre que Jon Voight. Ensuite, j'ai continué à faire des films, et c'est précisément comme ça que j'ai rencontré Ewan, sur un plateau de tournage. C'était dans Le Baiser du serpent, qui a été mon grand retour au cinéma. Ma carrière d'acteur était en train de sombrer quand j'ai rencontré Ewan. Et à l'affiche de ce film, il y avait de très grands noms, comme Pete Postlethwaite et Richard Grant.

Et je me suis dit : « Ça y est, je suis de retour. Je suis de retour dans l'industrie du cinéma. » En fait, le film était tellement nul qu'il est sorti directement en DVD. Ce fut la dernière étape de ma carrière d'acteur. Mais c'est là, sur ce plateau de tournage, que j'ai rencontré Ewan. Et je me souviens bien de cette rencontre et de la première conversation que nous avons eue ensemble. À l'époque, il possédait une Moto Guzzi Le Mans. C'est comme ça que je me suis approché de lui, nous nous sommes croisés dans un pub de la côte ouest de l'Irlande où nous faisions le film, et nous avons commencé à parler motos.

Et c'est d'ailleurs à peu près tout ce dont on a parlé pendant les 25 dernières années. Nous avons ensuite eu l'idée de faire Long Way Round, et nous voici aujourd'hui en train de parler de Long Way Up. Soit 13 ou 14 ans plus tard. J'ai du mal à comprendre comment le temps a pu passer aussi vite.

Quad Lock

Oui, je comprends. En réalité, j'ai les chiffres en main et Long Way Round date de 2004. Cela fait donc 16 ans.

Charley Boorman

Bon, mais rien ne vous oblige à être aussi précis sur les dates, vous savez.

Quad Lock

Vous avez fait un long chemin sur vos motos depuis ce fameux tricycle. Dans Long Way Up, il est amusant de vous voir dans cette position nonchalante, sur le côté, comme si vous preniez une tasse de thé sur votre moto, lorsque vous célébrez la fin du voyage.

Charley Boorman

YVous savez, les motos font partie de ma vie, un peu comme Ewan. Les gens me demandent : « Pourquoi avez-vous commencé à faire de la moto ? ». Mais on pourrait poser la même question à ceux qui font de l'équitation ou de l'escalade, ou qui sont passionnés par tout autre chose. En fait, je pense que c'est parce que quand j'étais jeune, mon père était un aventurier. Il parcourait le monde entier en réalisant des films dans des conditions extrêmement difficiles.

Dans le Pacifique Sud, à la fin des années 60 et au début des années 70, dans la jungle brésilienne, en Caroline du Sud sur une rivière... C'était donc un véritable aventurier. Il adorait voyager. Et je pense qu'Ewan et moi sommes tous les deux des aventuriers. Nous aimons voyager dans le cadre de notre travail. Vous savez, lorsque vous faites partie de l'industrie cinématographique, vous voyagez dans le monde entier pour faire des films et vous menez presque une vie de bohémien. C'est comme ça que c'est venu.

En plus, je crois que nous avons tous les deux commencé à faire de la moto dès l'âge de six ou sept ans. C'est pour ça. Et si le fait de passer son permis et de conduire une voiture est un peu comme une obligation, en revanche, faire de la moto est un choix. Je crois que ce qui fait la différence, c'est probablement d'où vous venez. En fait, Long Way Round et toute la série qui a suivi ont vu le jour parce que nous avions tout simplement envie de nous balader et de passer un peu plus de temps ensemble, vous savez.

Ce qui est intéressant, c'est que nous avons fait les deux premiers voyages assez rapidement et qu'il y a eu ensuite une longue pause avant le dernier. Il faut dire que pas mal de choses se sont passées entre le deuxième et le troisième. Ewan s'est installé aux États-Unis. Nous ne nous voyions plus vraiment beaucoup : lui résidait à Los Angeles et moi, je vivais ici. Il est revenu ici pour tourner un film en été. Mais moi, j'étais occupé à réaliser des émissions pour la télévision comme Extreme Frontiers et By Any Means, ou encore Race to Dakar.

Nous avions donc beaucoup de mal à nous voir et notre amitié était en quelque sorte en suspens. C'est alors que j'ai eu un très grave accident, en 2016, au cours duquel je me suis cassé les deux jambes. Il m'a fallu environ deux ans pour réapprendre à marcher. Et assez curieusement, c'est précisément un Quad Lock que j'avais au moment de cet accident sur la nouvelle Tiger 1200.

C'était dans le cadre d'un lancement que nous faisions avec la presse du monde entier. Je crois qu'il y avait un journaliste australien le jour où j'ai fait cette chute et que j'ai totalement détruit la moto. Je l'ai brisée en trois morceaux, il leur a fallu deux heures pour trouver la roue arrière : elle avait rebondi sur la route pour atterrir dans un jardin. En revanche, le Quad Lock était en parfait état. Tout comme mon téléphone. C'est dire à quel point le produit est de bonne qualité.

Quad Lock

C'est sûr que vous l'avez vraiment mis à l'épreuve !

Charley Boorman

La moto était complètement détruite.

L'un des gars de Triumph est venu me voir et m'a dit : « Charley, je suis sincèrement désolé pour tes jambes, mais si ça peut te consoler, sache que tu es la première personne au monde à pouvoir se vanter d'avoir détruit ce modèle de moto. »

J'ai donc au moins ça en ma faveur. J'ai alors reçu un appel [d'Ewan] et un type lui a répondu : « Écoutez, je suis vraiment désolé, mais Charley est en salle d'opération. » J'y suis resté 7 heures, le temps qu'il leur a fallu pour remettre mes jambes en place. J'ai donc traversé un moment très difficile.

C'est à ce moment-là que nous avons commencé à nous parler. Mais deux ans plus tard, alors que je viens à peine de recommencer à marcher, voilà que je repars me fourrer en Australie. Je veux dire, en Afrique du Sud. Chaque année, j'organise des voyages à moto. J'emmène des gens à travers l'Afrique. Et je ne sais pas ce qui s'est passé, mais voilà que je me réveille 18 heures plus tard et qu'on me dit que je me suis cassé l'avant-bras, qui s'est complètement retourné. Tous les os étaient sortis. Et puis la clavicule, le bassin, un traumatisme crânien massif...

Quad Lock

Cette séquence au début est vraiment impressionnante !

Charley Boorman

Oui. Cela a été atroce. Probablement pire encore. Je n'étais pas beaucoup plus handicapé, car quand vous vous cassez les deux jambes, il est très difficile de marcher. Mais il a fallu qu'on me ramène en avion ici. Ma femme a dû reprendre l'avion pour venir me chercher dans un autre pays et me ramener à la maison. Elle n'était pas très contente. Je vous assure. Elle était même furieuse. . .

Et n'a pas mâché ses mots. « Mais qu'est-ce que tu t'es encore fait, Charley ? Tu sais, tu ne m'impressionnes pas du tout. » Un éléphant a déboulé juste devant moi ou quelque chose comme ça, je ne sais pas.

Toujours est-il qu'Ewan est ensuite venu me rendre visite ici. Cela faisait si longtemps que nous n'avions pas passé de temps ensemble. J'étais coincé à la maison et je ne pouvais aller nulle part. Il était sur un tournage. Il était venu passer deux ou trois nuits, mais il est finalement reparti un mois plus tard. C'est là que nous avons commencé à parler de Long Way Up.

Et puis nous avons fait appel à Russ et Dave, qui avaient fait les autres voyages avec nous. Nous avions envie de faire quelque chose de vraiment différent cette fois-ci. Et c'est Russ, qui adore les premières et qui est toujours obsédé par les records, qui a dit : « Pourquoi ne pas le faire avec des motos électriques ? » Et c'est à ce moment-là que tout s'est mis en place.

Et nous avons tous dit : « D'accord, c'est vraiment une super idée ». Maintenant, si on avait su, on ne serait jamais passés à l'électrique. Je vous assure. Les premières semaines passées sur cette moto électrique ont été vraiment dures. Vraiment, vraiment difficiles, mais l'apprentissage a été énorme, et le voyage, incroyable.

Quad Lock

Il y a aussi un effort de planification incroyable. Un voyage de ce type demande toujours beaucoup de préparation, mais encore plus avec des motos électriques, car je suppose que les infrastructures n'étaient pas vraiment au rendez-vous.

Charley Boorman

En fait, il n'y en avait pas. Je veux dire que dans toute l'Amérique du sud, l'Amérique centrale et au Mexique, il n'y avait absolument aucune infrastructure pour la recharge des véhicules.

Quad Lock

Qui prend la décision finale concernant l'itinéraire et tout le reste ? Par où commencez-vous ?

Charley Boorman

En réalité, c'est Ewan et moi qui décidons où nous allons, comment nous le faisons, etc. Et puis ce sont Russ et Dave, qui sont formidables, qui nous aident à concrétiser ce que nous voulons faire. Mais la première chose à faire dans ce cas, c'était de trouver les motos. Au moment même où nous parlons, il y a un véritable déferlement de voitures électriques et à peu près tous les constructeurs automobiles lancent ce genre de véhicule sur le marché.

Et il ne fait aucun doute que c'est l'avenir. Personnellement, j'ai aujourd'hui une voiture électrique. Ce sont vraiment d'excellents véhicules si vous vivez en ville ou si vous ne faites pas beaucoup de kilomètres. Mais il y a tout juste un an, lorsque nous avons parlé de notre projet aux constructeurs, personne n'était prêt à quoi que ce soit. Seuls quelques-uns avaient vraiment quelque chose de solide à proposer. Et contre toute attente pour nous, le seul qui s'est vraiment imposé a été Harley Davidson.

Quand vous dites aux gens : « Vous savez, on a l'intention de traverser l'Amérique du Sud en moto électrique. » Les gens répondent : « En moto électrique, mais comment vous allez faire ? » Et vous poursuivez : « On va tenter le coup. » Et eux : « Mais avec quelles motos ? » Vous répondez : « Des Harley Davidson ! » Tout le monde s'exclame « Quoi ? Harley Davidson ? » Quand on vous parle de Harley Davidson, vous imaginez tout de suite de grosses cylindrées V-Twin, très bruyantes, mais lorsque vous êtes assis sur cette Livewire, vous découvrez que c'est la chose la plus incroyable à conduire.

Une sportive pure et dure. Elle accélère de 0 à 100 km/h en trois secondes. Et l'accélération de 60 à 130 km/h est fulgurante. Je veux dire que j'avais déjà piloté une Moto2 GP équipée du nouveau moteur Triumph et j'avais trouvé l'accélération initiale tout simplement incroyable. Dès que j'ai enfourché la Harley Livewire, j'ai eu exactement la même sensation. Lorsque vous accélérez très fort, la moto répond si rapidement que vous devez contracter toute votre ceinture abdominale pour éviter de faire ballotter votre estomac.

Nous sommes donc montés sur ces Harley Davidson pour les essayer. Puis nous leur avons dit que nous aimerions apporter quelques modifications pour en faire une vraie moto d'aventure. Et ils nous ont tout de suite répondu : « Bien sûr, sans problème. » Ils sont revenus quelques semaines plus tard avec cette moto que nous avons utilisée sur Long Way Up. Ça a été incroyable. Vraiment incroyable. Ensuite, en arrivant à Ushuaia, nous avons réalisé que nous n'avions roulé qu'une heure avec elles et que nous ne les avions pas rechargées. En réalité, nous ne les avions rechargées qu'une seule fois.

C'était dans un contexte où il y avait beaucoup de gens autour de nous, et avec des chargeurs rapides. Ce qui fait que même si c'est difficile à croire, nous n'avions aucune idée...

Quad Lock

Ce qui est amusant, on a l'impression qu'elles sortent tout droit de Star Wars. Avec ce son.

Charley Boorman

C'est vrai. Mais elles ont également un battement de cœur. Que vous sentez lorsque vous êtes assis à l'arrêt. Pendant la mise au point de cette moto, qui a pris environ six ans, les développeurs se sont rendu compte que lorsqu'ils s'arrêtaient à un feu rouge, l'absence de bruit, à laquelle ils n'étaient pas habitués, leur laissait penser que le moteur s'était éteint. Ils l'éteignaient alors en pensant la redémarrer, et au moment où le feu passait au vert, la moto ne démarrait pas.

C'est pour cette raison qu'ils ont ajouté ces légères pulsations, qu'ils appellent un battement de cœur au niveau du moteur. C'est vraiment sympa. C'est en fait le propre moteur qui est animé d'un léger frémissement et produit ce « boum-boum, boum-boum. » Quand vous êtes assis à un feu rouge ou autre, vous pouvez ainsi sentir les battements de cœur de la moto. C'est vraiment agréable. Vous pouvez voir dans le documentaire à quel point, au fil des deux premières semaines, notre courbe d'apprentissage a été incroyable. Nous ne savions même pas comment recharger.

Nous n'avions pas de chargeurs. Il n'y avait pas du tout de chargeurs rapides. Nous avions deux pickups Rivian électriques pour nous accompagner. Nous avons fait appel à cette société pour créer un réseau de recharge complet sur l'ensemble de l'itinéraire.

Et c'est ce qui a été fait. Des bornes de recharge ont commencé à être installées dans toute l'Amérique du Sud. L'un des grands enjeux du moment était de savoir qui serait le propriétaire du réseau de recharge. Les systèmes de recharge pour voiture et moto sont les stations-service de demain. Et cette société a dit : « Écoutez, nous les installons de toute façon. » C'est ainsi qu'ils ont mis en place des bornes de recharge de niveau 2. Malheureusement, celles-ci ne sont pas compatibles avec les Harley Davidson... Nous avions donc à notre disposition un incroyable réseau de recharge, mais nous ne pouvions pas l'utiliser !

La galère. Et puis nous avons eu aussi le pire hiver depuis 30 ans, avec des blizzards d'un froid glacial. Avant de pouvoir partir, nous avons dû patienter cinq jours que la neige cesse de tomber. Il faisait un froid extrême, or les batteries n'aiment pas le froid. Ce qui fait que vous avez moins d'autonomie, et, oh...

Quad Lock

Vous avez parcouru toutes sortes de terrains. Au départ, vous avez même l'air d'être sur de la glace. Il y a un moment où il y a beaucoup de boue, vous êtes au bord de falaises, visiblement sur du goudron. Mais ensuite, il y a du gravier : je pense que c'est dans le sixième épisode, où vous êtes sur ce gravier très meuble, en Bolivie. Et à un moment, on vous voit en train de vous parler à vous même pour vous persuader de tenir le coup et poursuivre la route. C'est pétrifiant à regarder.

Charley Boorman

Oh, c'était la Bolivie. Je crois que la Bolivie a été notre route la plus difficile. Je pense que nous avons fait le trajet à l'envers. Le voyage a été vraiment difficile au début, puis petit à petit il est devenu de plus en plus facile, au fur et à mesure que nous avancions. Et je pense que c'est une chance, parce que si nous avions fait le chemin en sens inverse, nous serions passés des chargeurs rapides aux États-Unis à nous retrouver en Amérique centrale et en Amérique du Sud sans aucune infrastructure, avec l'obligation de recharger chaque soir, toute la nuit.

Et nous serions devenus fous. L'une des choses les plus intéressantes de ce voyage, c'est que nous ne savions pas trop ce qui allait se passer. En fait, ce que nous devions faire, c'était entrer dans des auberges de jeunesse, des chambres d'hôtes, des hôtels, des restaurants ou des commerces et leur demander s'il était possible de brancher nos motos. Et nous pensions que ce serait difficile.

Que les gens ne nous laisseraient pas utiliser leur électricité. Même si, bien sûr, nous avions prévu de les payer. Mais ce qui a été incroyablement surprenant, c'est que pendant tout le voyage, pas une seule personne ne nous a dit « Non ». Il faut savoir que nous nous sommes installés dans des hôtels, des restaurants et même chez des gens que nous avons plongés dans le noir le temps que nous rechargions nos motos. Ce qui était vraiment intéressant, c'est que pendant que nous rechargions dans ces maisons, ces commerces, nous établissions un véritable contact avec les gens et leur mode de vie.

De ce fait, le voyage a été une expérience complètement différente. Pendant chaque recharge, nous avions le temps de connaître les gens, de voir où ils habitaient, de comprendre comment ils vivaient. C'était très intéressant, vous savez. Et cela a été un vrai plus.

Quad Lock

Je comprends. Vous avez dû croiser des gens incroyables sur votre chemin...

Charley Boorman

Oh, oui, bien sûr. Je me souviens d'une personne qui parlait de l'analogie entre le fait de se brancher et de faire connaissance avec des gens. Dans un voyage, quel qu'il soit, ce qui importe n'est pas tant de se rendre d'un point A à un point B. Le plus souvent, ce qui vaut le déplacement, c'est ce qui se passe entre les deux.

Vous ne vous souvenez jamais des bonnes journées où il ne s'est rien passé. Ce dont vous vous souvenez, c'est des jours où vous avez rencontré une personne extraordinaire, mais aussi des moments où vous avez craqué, ou encore lorsque les choses ont mal tourné. Ce sont ces choses-là, ces souvenirs que vous garderez pour toujours.

Quad Lock

Qu'est-ce qui vous a le plus marqué ?

Charley Boorman

Il y a eu cette fois où nous sommes allés dans un hôtel, je pense que nous étions en Argentine... Non, nous étions au Chili ! Nous avions enfin réussi à trouver une forme de civilisation et nous faisions halte dans une ville tranquille, touristique. Mais nous avions besoin d'une recharge supplémentaire pour pouvoir atteindre notre destination. Nous avons repéré un restaurant vraiment sympa, où je me suis dit qu'on pourrait s'asseoir et bien manger pendant les quelques heures nécessaires à la recharge des motos.

Mais chaque fois que nous tentions de brancher nos motos sur le secteur, nous plongions la cuisine du restaurant dans le noir. Et il y avait des clients assis, en train de déjeuner. On ne nous a jamais dit « Non ». Tout le monde a fait son possible, par exemple en éteignant les fours, tout simplement pour que nous puissions recharger. Finalement, cela n'a pas été possible. Nous avons dû enfourcher nos motos et nous rendre dans un camping où il y a toujours de l'électricité.

Pendant que nous rechargions nos motos, nous y avons rencontré un couple incroyable. Je crois que c'est dans le troisième épisode ou quelque chose comme ça, je ne m'en souviens plus. Le couple en question voyageait depuis l'Europe. Nous avons déjeuné avec eux et ils nous ont raconté leur histoire, tout simplement extraordinaire. Lui était parti d'Europe de l'Est. En passant par la Turquie, il avait rencontré cette fille dans un petit village, où elle était institutrice.

Ça a été une sorte de coup de foudre. Mais il devait repartir et c'est ce qu'il a fait. Très vite, il s'est rendu compte qu'il ne pouvait pas la laisser. Alors, il est retourné la voir. Elle vivait alors dans une famille turque très traditionnelle, où les femmes doivent se plier à un certain nombre d'obligations. Elle a simplement fait ses valises et raconté à son père qu'elle avait trouvé un emploi d'enseignante dans une école à Istanbul, alors qu'elle se retrouve finalement à vivre une aventure incroyable au Chili en compagnie de cette personne.

Dans la série, quand vous la voyez parler de ce garçon, vous pouvez lire l'amour dans ses yeux. Cela nous montre que quels que soient les obstacles, nous devrions tous être autorisés à vivre notre vie comme nous l'entendons. Cette femme venant d'un milieu très traditionnel en est un bel exemple. Alors, nous avons plaisanté en lui disant que si jusqu'ici son père ignorait tout, il savait désormais qu'elle était au Chili, pas à Istanbul.

C'est une histoire fantastique, ils sont tellement amoureux l'un de l'autre. Vraiment une belle, une très belle histoire.

Quad Lock

Il y a d'autres anecdotes, par exemple à la fin, lorsque vous traversez un territoire en quelque sorte dangereux, cette fois-ci pas à cause des routes, mais des rencontres que vous pourriez faire. Je suppose qu'une certaine planification a été nécessaire pour éviter les cartels.

Charley Boorman

Oui. En réalité, je pense toujours qu'il n'y a pas grand-chose à craindre, mais nous étions un peu inquiets en traversant le Mexique, car nous transportions beaucoup de matériel cinématographique. Il y avait toute une équipe et puis nous avions Ewan McGregor avec nous. Nous craignions que cela attire un certain nombre de personnes. Mais il faut se dire qu'il y a des milliers de gens qui traversent l'Amérique du Sud chaque année en bus, en moto, en voiture, à pied, à vélo, tout comme en Afrique.

Et on n'entend jamais vraiment parler de gens qui se sont attiré des histoires. On entend parfois que quelqu'un s'est fait dévaliser ou voler ses affaires, mais rien de vraiment grave. Je pense que dans l'ensemble, c'est donc assez sûr. Ce qui ne veut pas dire qu'il ne faut pas être vigilant. En tout cas, dans ce voyage, nous n'avons jamais vraiment été confrontés à une situation de ce genre. . .

Quand nous étions au Honduras, nous avons participé à un projet de l'UNICEF en faveur d'enfants qui s'étaient livrés au trafic de drogue et de personnes, à la prostitution, etc. Les cartels les attirent avec des smartphones, des Nike ou des vêtements de marque, puis finissent par les utiliser et les forcer à faire des choses, en les maltraitant. Et ils sont pris au piège. Si pour une raison ou une autre, l'enfant prend conscience de la gravité de la situation et veut abandonner le trafic de drogue, il est traîné dans une pièce où se trouvent ses parents.

Parfois, l'un d'eux est abattu devant ses propres yeux, puis on le menace de tuer l'autre, puis de continuer avec sa grand-mère et son grand-père, s'il ne fait pas ce qu'on lui dit. C'est donc un univers très violent. Et l'UNICEF est là pour tenter de créer un environnement dans lequel ces enfants peuvent se réfugier. Un environnement sécurisé, où ils ont la possibilité de vivre comme des enfants, plutôt que de faire ces choses qu'on leur a dit de faire.

Il y a donc là bien sûr un problème énorme à ce niveau. Mais cela concerne surtout la population locale, pas les touristes. Il faut essayer de contribuer à la sécurisation de ces villes et villages. Et la situation s'est d'ailleurs considérablement améliorée au cours des 10 dernières années. Avec l'un de ces anciens membres de gang, j'ai notamment eu la possibilité de parler du danger dans les villes. Et à ma question « Où se trouvent les villes les plus dangereuses au monde ? », il m'a répondu : « Trois des cinq villes les plus dangereuses au monde se trouvent aux États-Unis d'Amérique. Et puis, il y en a une ou deux en Europe. » La situation en Amérique centrale et en Amérique du Sud n'est donc pas si mauvaise aujourd'hui. Et il y a tout type de gens. C'est à cela que les gouvernements du monde entier doivent faire attention.

En Occident, en Australie, etc., nous avons toujours tendance à critiquer les pays dans lesquels les gens ne vivent pas comme nous. Et sous prétexte qu'ils sont un peu plus pauvres, qu'ils vivent autrement ou qu'ils ont des idées différentes, on nous dit que ce n'est pas bien. C'est une erreur. Ces pays sont simplement différents et ne font pas comme nous. Il faut laisser les gens faire ce qu'ils veulent et nous devons être conscients que certains des endroits les plus dangereux de la planète se trouvent précisément dans notre monde civilisé.

Quad Lock

Finalement, vous avez réussi à rejoindre les États-Unis. À l'arrivée, vos émotions devaient être très partagées. D'un côté, vous deviez être heureux d'avoir atteint votre objectif, mais je suppose que de l'autre, vous étiez tristes d'arriver au terme de cette incroyable aventure.

Charley Boorman

Vous savez, lorsque nous repensons à cette expérience, nous revivons des choses très différentes. Les gens nous demandent souvent quelle a été la meilleure partie du voyage, mais vous répondez que vous ne pouvez pas vraiment nommer une partie ou un pays en particulier. Nous revenons avec des souvenirs incroyables, comme quand nous avons traversé le désert en Bolivie. C'était tellement difficile de conduire ces motos dans ce sable profond, graveleux, sur ce terrain terriblement ondulé. Vous savez, ces ondulations que l'on retrouve également en Australie, dans l'Outback, et qui vous martèlent. Ewan et moi, nous avons roulé sur des trucs comme ça en Afrique, des ondulations terribles.

Mais de toute ma vie, même après avoir fait le rallye Dakar, je n'avais jamais subi une piste comme celle-là. Nous avions à notre disposition l'équivalent de peut-être 30 voies de large. Nous roulions d'un côté, puis nous regardions de l'autre côté et nous nous disions : « Oh, ça a l'air mieux là-bas ». Alors, nous changions,mais la piste y était tout aussi mauvaise. Et pourtant, nous avions à notre disposition une largeur de 30 voies.

C'était tout simplement incroyable. Et puis il y a eu la descente du Machu Picchu, depuis cette extraordinaire cité perdue au sommet des montagnes. Nous sommes passés d'une altitude de plus de quatre mille cinq cents mètres jusqu'au niveau de la mer en une seule étape. Pendant quatre heures et demie, cinq heures, nous avons roulé sur la route la plus extraordinaire, la plus sinueuse, la plus insensée qui soit. Nous avons ensuite sillonné de superbes vallées jusqu'au sud du Mexique, puis dans le centre du pays. C'est l'un des endroits les plus étonnants où je pense être jamais allé.

Et puis il y a ce moment final, après cette aventure, où nous montons dans le bus pour traverser la frontière et entrer aux États-Unis. Brusquement, tout devient calme. C'est un peu comme regarder le jardin parfaitement entretenu de votre voisin alors que le vôtre est un vrai désastre. Et vous pensez « Hum... j'ai des progrès à faire ». Puis tout d'un coup, tout fonctionne. Vous pensez « Waouh ! ». Il y a eu notre première charge avec un chargeur rapide, c'était tout simplement incroyable. Vous avez tout juste le temps de vous assoir : vous branchez la moto, et elle se recharge à toute vitesse.

De l'ordre de trente-cinq à quarante minutes pour une pleine charge. Vous êtes un peu comme quelqu'un qui verrait fonctionner un escalator pour la première fois : « Mais comment est-ce possible ? » Vous êtes en pleine extase. Puis il y a les retrouvailles avec les amis. Et surtout avec la famille. Chaque voyage que vous faites dure comme toute une vie.

Comme le dit Ewan, c'est un peu comme un minimariage. Vous vous rencontrez, puis vous roulez ensemble, vous vivez ensemble, vous prenez des décisions ensemble, vous vous ennuyez ensemble, vous vous frustrez ensemble, etc. Ces voyages sont comme une vraie vie. Donc, lorsque vous arrivez à la fin, une partie de vous sait que le moment est venu d'y mettre un terme. Mais une partie encore plus grande voudrait que cela dure plus longtemps.

Et c'est là que vous commencez peut-être à envisager d'en faire un autre. Ou tout au moins, vous y pensez. Donc ça veut dire que quand le voyage que vous êtes en train de faire arrive à son terme, c'est finalement bon de s'arrêter, parce que vous savez que vous allez en faire un autre. C'est en quelque sorte ce qui s'est passé quand nous sommes arrivés à Los Angeles.

Quad Lock

D'où la grande question : est-ce qu'il y en aura un autre ?

Charley Boorman

Je pense que oui. En tout cas, je l'espère. Nous avons parlé de faire un Long Way Scandinavia ou un Long Way Down Under. Nous l'avions déjà envisagé. Et de ces deux-là, je pense que Long Way Down Under semble être le plus logique. Oui, nous avons tous les deux encore beaucoup d'énergie en nous, c'est tout du moins ce que j'espère. Et je pense que j'ai eu personnellement assez d'accidents comme ça pour tout le monde. Donc, j'espère qu'avec un peu de chance, nous pourrons mettre cela sur pied.

Quad Lock

Une fois de plus, on peut dire que vous avez mis le Quad Lock à l'épreuve, après vingt et un mille kilomètres. Sans compter tous les accidents précédents. Alors, oui, c'est une série absolument incroyable. Je ne peux qu'encourager ceux qui ne l'ont pas encore vue à le faire. Comme je le disais au début, même si vous n'avez pas forcément envie de regarder un documentaire de voyage en plein confinement, n'hésitez pas, vous vous sentirez tellement mieux !

Charley Boorman

C'est très gentil de votre part. Et je pense que c'est une série très intéressante, plus que toutes celles que j'ai pu faire comme By Any Means et Extreme Frontiers, entre autres. Hormis une ou deux que j'ai réalisées en Australie, je pense que celle-ci est aussi celle où j'ai eu le plus de retours. Et la plupart des gens qui m'appelaient me disaient : « Oh, je n'en croyais pas mes yeux. » Je pense que c'est en partie lié à l'aventure elle-même, mais aussi à la technologie électrique utilisée. Au début, avant de commencer la série, j'ai reçu pas mal de réactions négatives du genre « Nous sommes ravis que tu fasses ce voyage, mais pourquoi en moto électrique ? Nous ne sommes pas sûrs que ce soit une bonne idée. » Heureusement, les gens ont fini par comprendre un peu mieux. Mais il y a une chose qui est très intéressante. L'autre jour nous parlions entre nous et je disais : « Vous savez ce qui est vraiment drôle ? » Nous avons formé un groupe WhatsApp avec l'équipe. Avec Russ, Dave et tous ceux qui ont participé au projet. Et donc, je plaisantais en disant : « Vous savez, ce qui est drôle, c'est de penser que quand nous regarderons cette série, dans cinq ou six ans, et encore plus dans dix ans, nous rirons nous-mêmes de cette technologie électrique complètement dépassée : les choses vont aller si vite ! ».

Quad Lock

Vous êtes de vrais pionniers en la matière. J'ai été ravi de bavarder avec vous, Charley, et j'espère avoir prochainement l'occasion de poursuivre notre conversation. Cela a été vraiment formidable d'en apprendre un peu plus sur les coulisses de cette série incroyable. Merci d'avoir accepté de vous joindre à nous aujourd'hui.

Charley Boorman

Oh, mais ça a été un vrai plaisir. Merci à vous. Et sachez que j'adore ce que vous faites chez Quad Lock. Je suis très fan depuis des années et je suis très heureux de faire partie d'une toute petite partie de Quad Lock.

Quad Lock

Le plaisir est réciproque. Vraiment formidable de travailler avec vous. Merci Charley. À bientôt.

Charley Boorman

Au plaisir, merci beaucoup. Bonne soirée. Et à bientôt.

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